Interludes | Matthieu Rialland | 2 février 2025
Rentrer d'exil pour plonger en soi-même. Perdre un amour vingt ans d'âge, ça vous démolit en petits morceaux, d'abord. On s'en tire par la colère, la rancune. La culpabilité, aussi. Mais ça ne dure qu'un temps.
Ensuite s'installe une sorte d'insensibilité. Les deux pieds collés au fond du puits par la glu qui vous sert à recoller les morceaux, on s'habitue à n'y voir goutte et à respirer le moins possible. On s'atrophie. On diminue. On disparaîtrait presque.
Six mois. Un an. Deux ans. Peut-être trois. Et puis voilà, soudain, le printemps.
Mon Dieu, que les femmes sont belles. Les autres femmes. Celles qui ne vous inspirent ni nostalgie, ni ressentiment. Celles qui vous croisent sans vous connaître, mais qui peut-être reconnaissent sur votre visage les marques de ce qui s'est passé. Celles que vous dévisagez, que vous regardez comme autant de merveilles. Autant de merveilles intactes et intouchables.
Pour les toucher, pour imaginer les toucher, pour oser l'imaginer, il faudra encore du temps.
Ça tombe bien, vous en avez.