Chants | Matthieu Rialland | 2 novembre 2003
Des voix ont chanté, dans la nuit lointaine. Elles étaient hautes et droites, elles étaient la grâce.
Je me suis approché, sous le couvert des arbres, et j’ai découvert ce prodige : Léviathan le Dragon, l’avaleur de soleils, le puissant venimeux qui nous a faits esclaves, s’assoupissait lentement en regardant danser autour de lui une tribu de filles nues et graciles, couronnées d’or, belles à mourir. C’étaient les fées, qui lentement tissaient la nasse, le sortilège en plein milieu duquel venait de choir le Prince des Dragons.
Mon maître Léviathan balayé par quelques femmes ? J’en serais mort de rire…
Mais l’effroi glaçait mon coeur.
Si elles l’avaient vaincu, mon sort était réglé, car en leur pouvoir il n’aurait pu me libérer de mes chaînes.
Alors, la mort dans l’âme, je dégainai l’épée et chargeai les danseuses, qui s’égaillèrent en tous sens et se fondirent dans l’ombre de la forêt profonde. Et l’infâme serpent ailé revint à lui. Ses petits yeux de feu étaient intenses et froids. Comment n’y ai-je point planté ma lame !